À Roland-Garros, Loïs Boisson écrit un conte de fées moderne qui bluffe jusqu’à Marion Bartoli, émue et admirative.
Il y a parfois des histoires qui dépassent les scores. Des moments de grâce inattendus. Le parcours de Loïs Boisson à Roland-Garros 2025 en fait partie.
Avant le tournoi, peu de gens en France auraient misé sur elle. Classée au-delà de la 360ᵉ place mondiale, encore dans l’ombre, elle a pourtant traversé ce Roland-Garros 2025 comme une comète. Match après match, elle a fait tomber des têtes, bousculé les certitudes, renversé les logiques. À seulement 23 ans, Loïs Boisson a tenu le choc, même sous pression, même après des blessures qui auraient pu l’éloigner définitivement des courts. Une invitée de dernière minute devenue alors l’histoire du tournoi.
Roland-Garros 2025 : Loïs Boisson, l’invitée qui a tout cassé
Dès le premier match, le ton était donné. Sur le court le plus reculé du stade, face à Elise Mertens, tête de série 24, Loïs Boisson a joué comme si elle n’avait rien à perdre. Ce qu’elle a gagné ce jour-là ? Plus qu’un match : une confiance brute, forgée dans l’adversité. Elle a ensuite enchaîné les victoires avec une forme d’élan, comme portée par une force intérieure qu’on ne voyait pas forcément dans les statistiques.
Contre Kalinina, elle n’a pas bronché. Contre Elsa Jacquemot, elle a tremblé un instant, puis s’est reprise. Et puis il y a eu Jessica Pegula, numéro 3 mondiale. Là, Loïs Boisson a fait ce que personne n’imaginait : elle l’a battue, sèchement. Pas volé, pas sur un malentendu. Juste avec du jeu, du mental et un sens de l’espace qui n’appartient pas à n’importe qui.
Et puis, encore plus fort, elle a dominé Mirra Andreeva, 6ᵉ mondiale, en deux sets. À ce moment précis, le public l’a vraiment adoptée. Elle ne jouait plus en outsider, elle faisait ainsi corps avec le court. Même Marion Bartoli, dernière Française titrée en Grand Chelem, a salué sa capacité à encaisser l’intensité, à jouer juste même quand le corps est en surchauffe. Un retour de blessure qui en dit long sur sa détermination. « Elle est capable de décocher des revers qui surprennent ses adversaires », a-t-elle expliqué.
Et de continuer : « Elle n’a pas encore l’habitude de jouer à une telle intensité face à des adversaires du top 10. C’est une autre planète comparée au circuit ITF ». Avant de continuer : « Et pourtant, elle les surpasse physiquement. C’est ça qui me sidère. Elle revient d’une rupture des ligaments croisés — une blessure lourde, lente à guérir, où beaucoup de joueuses peinent à retrouver leur niveau. Et elle, non seulement elle revient, mais elle le fait en dominant ».
« Rappelez-vous son premier tour, contre Elise Mertens, planquée sur un court au fin fond du stade… Elle perd le deuxième set, et personne n’aurait parié qu’on la retrouverait dix jours plus tard en demi-finale de Roland. Elle est allée chercher cette qualif au plus profond d’elle-même. Parfois, c’est justement une grosse blessure qui vous remet les idées en place, qui vous montre à quel point vous avez envie d’être là. Et elle, elle n’a laissé aucun doute ».
Aucun regret
Jeudi, le rêve s’est arrêté. Coco Gauff était plus forte, plus rapide, plus solide. En 1h10, l’Américaine a plié le match : 6-1, 6-2. Rien à redire. Loïs Boisson n’a pas démérité, mais elle n’a jamais réussi à imposer le rythme. Et juste avant le dernier jeu, elle s’est blottie dans sa serviette. Geste simple, humain. Peut-être pour cacher des larmes. Peut-être juste pour reprendre son souffle. C’est Justine Henin, au micro, qui a mis les mots : elle voulait sûrement s’effacer un instant, digérer la violence du score.
Mais ce qui compte, ce n’est pas cette demi-finale. C’est le chemin jusqu’ici. C’est ce qu’elle a montré à chaque tour, cette rage de prouver, cette envie de rester sur le terrain, coûte que coûte. Ce genre d’élan ne se commande pas. Il vient de loin. D’une volonté profonde de revenir, malgré tout. De dire, par le jeu, “je suis là”.
L’avenir est ouvert
Elle repart sans trophée, mais pas sans victoire. Loïs Boisson a marqué les esprits, et pas seulement ceux des passionnés de tennis. Elle a montré que les étiquettes, les classements, les pronostics… tout ça peut voler en éclats si on y croit assez fort. Et si son jeu n’est pas encore parfaitement lisse, son revers slicé en témoigne, elle a ce truc rare : l’instinct. Ce petit grain de folie qui fait en effet bouger les lignes.
Son retour de blessure, son mental, son énergie… tout indique que ce Roland n’est pas un feu de paille. Elle a vécu dix jours qui peuvent transformer une carrière. À elle, maintenant, d’en faire quelque chose. Et à nous de la suivre sans oublier ce qu’elle vient d’accomplir. Parce que des surprises comme Loïs Boisson, on n’en voit pas souvent. Et franchement, ça fait du bien.